Rétro - Ep1. Narbonne : La clé du vestiaire

Le rugby, fort de plus de deux cents ans d’histoire, garde en lui des anecdotes inoubliables, des équipes de légendes, des joueurs d’une rare classe. Ovalie Média vous propose une nouvelle série au cœur des entrailles de ce sport afin d’en revivre les moments les plus marquants. Épisode 1 : la clé du vestiaire.

Claude Spanghero (à gauche) capitaine du Racing Club Narbonne champion de France 1979. Crédit photo : L'indépendant.

1979, demi-finale de championnat de France, Montferrand face au Racing Club Narbonnais.

Les deux clubs se tirent la bourre depuis quelques années : Narbonne roule sur l’ovalie et vient de remporter un nouveau Challenge Yves Du Manoir, quatrième trophée du club de la saison, face aux mêmes auvergnats, finalistes du championnat de France un an auparavant. Mais la dynamique est montferrandaise en cette fin de saison. Les jaunes et bleus viennent d’éliminer le Stade Toulousain au tour précédent. La presse voit déjà le Clermont de Frédéric Costes en finale. Narbonne s’avance donc à Lyon sans l’étiquette de favori…

Les Audois forment une véritable équipe pleine de talent de jeunes pousses ravageuses, encadrée par Gérard Sutra et prônant un rugby d’antan, portant un maillot à col en coton trop large, authentique, sans brochure ni sponsor, servant seulement à essuyer sang et sueur. Amenés par capitaine courage : Claude Spanghero, quatrième du nom, les coéquipiers de Didier Codorniou et Guy Ramon sont à la poursuite d’un second bouclier de Brennus qui leur échappe depuis plus de quarante ans.

Agacé toute la semaine par les remarques dans la presse et notamment celle de la veille dans le journal L’Équipe qui donnait l’ASM vainqueur à plus de 60%, Claude Spanghero décida d’empêcher le président, Bernard Pech de Laclause, et le coach, Gérard Sutra de rentrer dans les vestiaires de Gerland. Il avait choisi d’en faire une histoire singulière avec ses hommes…

“J’ai fermé la porte à clés puis j’ai jeté la clé par la fenêtre. Comment en sommes-nous sortis ? Avec les piliers, nous avons cassé la porte à grands coups de tête et à grands coups d’épaule” - Claude Spanghero.

Sur le terrain, les Narbonnais concassent, fracassent leurs adversaires. Animés par le goût du sang dans la bouche, les Narbonnais renversent la première mêlée et font la loi sur le rectangle vert. Les Audois marquent la mémoire commune d’une agressivité inouïe et s’imposent 19 à 9. Plus de quarante ans plus tard, ce succès en demi-finale met un point d’honneur à cette épopée fantastique. Claude Spanghero, un meneur d’homme comme rarement en avait-on vu, parle encore du “match référence”.

En finale, le RC Narbonne retrouve le Parc des Princes, cinq ans après la désillusion dans les ultimes secondes face au rival biterrois. Dans une finale fermée face au Stade Bagnérais, Trallero marque l’unique essai de la rencontre et les Méditerranéens l’emportent 10-0. Claude Spanghero soulève enfin le bout de bois et s’inscrit dans le marbre de la grande histoire du rugby.

Tylian Auriol